dimanche 7 avril 2013

J'ai eu peur d'un quartier autrefois / Hurtubise


Patrick Drolet est connu en tant qu’acteur, mais il est aussi l’auteur du recueil poétique Un souvenir ainsi qu’un corps solide ont plusieurs tons de noirceur et du roman J’ai eu peur d’un quartier autrefois.

La déroutante histoire de ce court roman est faite d’images fortes et de descriptions étranges. De nombreuses personnalisations rendent le récit vivant. La porte d’entrée était figée dans son cadre. Elle semblait vouloir pleurer l’humidité par ses pores. L’homme est plus intéressé par les objets que par les gens, dont il se tient loin. Il craint autant de répondre à l’enfant qui fait du porte-à-porte que de tenir une conversation avec un chauffeur de taxi. Une solitude profonde l’habite, mais elle est désirée.

Au début, la mort violente du voisin semble déclencher ses angoisses et une peur de l’extérieur. Puis on découvre que l’homme correspondait avec un prête qu’il avait connu au collège, mais cela a été interrompu dans des circonstances nébuleuses qu’il décide d’éclaircir pour n’en revenir que plus troublé. Le seul moment où le réel prend davantage le dessus est lors de l’évocation des souvenirs du collège. Le reste du temps, on dépeint un imaginaire trouble où paranoïa et divagations sont omniprésentes. Le récit, à la première personne, révèle les cauchemars éveillés et les pensées intimes de l’homme.

Pendant ma lecture, il m’est revenu en tête un classique, Le Horla de Maupassant, à cause de l’ambiance angoissante de l’histoire laissant imaginer que soit le personnage est fou, soit il perçoit une dimension terrorisante et invisible pour le commun des mortels. Par exemple, un jour, il observe une voiture qui ne lui renvoie pas son reflet et il entre en contact avec elle. J’arrivais à présent à sentir l’historique de la voiture, sa naissance en banlieue de Detroit, son premier maître, un médecin de Pittsburgh, qui s’était suicidé à l’intérieur d’elle en s’asphyxiant avec un sac de plastique. Il prétend aussi percevoir une ombre cannibale qui rôde, un charmant synonyme pour la Faucheuse.

L’univers menaçant intrigue, fascine et déstabilise. On se laisse prendre au jeu non sans une certaine confusion. Est-ce qu’on a du plaisir pendant le voyage même s’il n’y a pas forcément de destination précise? Tout à fait.

Note de la rédactrice : 3,5/5